La France a demandé aux Hutu de quitter le Rwanda à la fin de l'opération Turquoise

 

Kigali, 30 octobre (ARI) – « Les soldats français de l'opération Turquoise ont demandé à la population hutu de quitter le Rwanda pour ne pas être exterminée par les militaires du FPR qui venaient de mettre en déroute les forces génocidaires », selon un témoin interrogé par l'Agence Rwandaise d'Information (ARI).

 

Jean Damascène Nyandwi est originaire de l'ex-province de Gikongoro qui faisait partie de la Zone Humanitaire Sûre (ZHS) mise en place par la France à travers l'opération Turquoise. Il vivait à Kanombe dans la périphérie de Kigali avant de retourner à Gikongoro en 1993. Des centaines de milliers de personnes à majorité hutu s'y étaient réfugiées pendant le génocide à la demande du gouvernement génocidaire qui fuyait l'avancée du FPR.

 

Jean Damascène Nyandwi a révélé à ARI qu'un grand meeting populaire avait alors été organisé à Isumba, commune de Nyamagabe, ville de Gikongoro. « Si vous ne fuyez pas vers le Zaïre, les Inkontanyi (nom des soldats du FPR, ndlr) vont vous égorger », avaient dit les soldats français de l'opération Turquoise au cours de ce rassemblement. Les soldats français qui ne connaissaient pas le Kinyarwanda s'adressaient à la population rassemblée une main à la gorge en signe d'une machette qui égorge.  

 

Jean Damascène Nyandwi a indiqué également à ARI que les soldats français de l'opération Turquoise pourchassaient les Tutsi   au motif que ce sont les soldats du FPR  qui ont infiltré la ZHS. « Les personnes capturées ont été conduites vers une destination inconnue jusqu'aujourd'hui. J'ai comme l'impression que les Français avaient même des appareils qui leur permettaient de savoir là où les gens s'étaient caché », a déclaré Jean Damascène Nyandwi.

 

Jean Damascène Nyandwi a également déclaré à ARI que, dans la province de Gikongoro, les soldats français ont appris aux miliciens Interahamwe, fer de lance du génocide, comment creuser des tranchées dans lesquelles ils devaient se cacher à l'arrivée des militaires du FPR.   Et ce,  durant les trois mois du génocide des Tutsi en 1994

 

Jean Damascène Nyandwi accuse les Français d'avoir entraîné dans les années 1992 les Interahamwe. Jean Damascène Nyandwi qui faisait le travail de constructeur à cette époque-là sait de quoi il parle car il détenait la carte de la CDR (Coalition pour la Défense de la République, parti extrémiste hutu, coresponsable du génocide).

 

« A cette époque-là, il était impossible de trouver un job si tu n'as pas de carte attestant que tu es membre de la CDR et du MRND », nous a-t-il déclaré. Jean Damascène Nyandwi qui vivait en 1992 à côté de Kanombe, ville de Kigali, accuse la France d'avoir entraîné aussi bien les ex-Forces Armées Rwandaises que les miliciens interahamwe.

 

Les interahamwe Mutombo, Katabirora Jean, Shagaye qu'il connaissait bien lui avaient dit qu'ils étaient formés par les Français pour qu'ils soient en mesure le moment venu de barrer la route au FPR. « D'ici peu, la sang va couler à flot », aimaient-ils dire à leur retour de la formation supervisée par les Français à Kanamba et à Gishwati selon le témoignage de   Jean Damascène Nyandwi.

 

Quelques mois avant le génocide, les interahamwe Mutombo, Katabirora Jean, Shagaye ont tué un certain Straton Byabagamba l'accusant d'aider les Tutsi à obtenir des documents leur permettant de rejoindre le maquis du FPR.  

 

A la question de savoir comment il distinguait les ex Forces Armées Rwandaises des Interahamwe, Jean Damascène Nyandwi dit que la distinction était facile à opérer.   Outre que lui-même faisait partie de la CDR, il y a le fait que les militaires regagnaient leurs casernes et les Interahamwe leurs villages après la formation. C'était donc deux groupes distincts.

  

Les reporters de l'Agence Rwandaise d'Information ont rencontré Jean Damascène Nyandwi dans les locaux de la Commission rwandaise sur le rôle de la France dans le génocide de 1994. Il était venu de sa propre initiative pour apporter sa contribution dans la recherche de la vérité sur le rôle de la France dans le génocide.    
 
 
Le soutien de la France aux auteurs du génocide s'est poursuivi au Zaïre

 

Kigali, 30 octobre (ARI) – La France a continué à soutenir les forces génocidaires exilées au Zaïre selon le témoignage du   Colonel Martin Ndamage devant la Commission rwandaise d'enquête sur le rôle de la France dans le génocide de 1994, a établi l'Agence Rwandaise d'Information (ARI).

 

Membre des ex-Forces Armées Rwandaises, Martin Ndamage est co-signataire de la Déclaration de Kigeme qui condamnait le génocide et se désolidarisait du gouvernement qui était entrain de le commettre. Le gouvernement de l'époque décida de démettre de l'armée tous les signataires de la Déclaration de Kigeme et de les mettre hors d'état de nuire.

 

Redoutant des affrontements entre dissidents et forces loyalistes à Kigeme (ex-province de Gikongoro) qui faisait partie de la zone sous contrôle des soldats français de l'opération Turquoise, la France décida d'évacuer Martin Ndamage et quelques uns de ses collègues vers Kavumu (30 Km au nord de Bukavu au Zaïre) où elle avait établi une base militaire.

 

Après la défaite des forces génocidaires et leur exil au Zaïre, Martin Ndamage et ses collègues demandèrent de rencontrer le général Roméo Dallaire puisqu'ils voulaient retourner au Rwanda. Les soldats français s'y opposèrent mais Martin Ndamage et ses collègues finirent par rencontrer à Kavumu le général Roméo Dallaire qui commandait les forces de l'ONU au Rwanda.

 

Martin Ndamage et son groupe furent humiliés par les soldats français à Kavumu après qu'ils aient pris la décision de rentrer au Rwanda de commun accord avec le général Dallaire. «Nous ne pouvons pas continuer à rester avec vous ici alors que vous vous opposez à votre gouvernement », avaient dit sèchement les soldats français de l'opération Turquoise.

 

A la tombée de la nuit,  Ndamage et son groupe furent brimés, désarmés et expulsés de la tente où ils logeaient au motif qu'ils s'opposent à leur gouvernement. Le gouvernement dont parlaient les soldats français c'est celui qui venait de commettre le génocide et qui se trouvait en exil à l'est du Zaïre.

 

L'analyse de ce témoignage fait ressortir l'idée que la France voulut maintenir les forces génocidaires dans les hauteurs du Kivu (est de la RDC) et les préparer à reconquérir par la force le pouvoir au Rwanda. (Fin)

 

ARI-RNA/Gén/D.M/ 30. 10. 06/10:40 GMT

 

 

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