France-Rwanda/génocide :

 

Synthèse des auditions du 25/10/2006

 

Kigali, 26 oct. (ARI) :  Au deuxième jour de ses auditions publiques, la « Commission Nationale Indépendante chargée de rassembler les preuves de l'implication de l'Etat français dans   le génocide de 1994 au Rwanda » a entendu les dépositions de quatre témoins :

-        Kayimahe Vénuste,

-        Elysée Bisengimana,

-        Nyandwi Désiré,

-        Martin Ndamage.

 

Kayimahe Vénuste :

Employé du Centre culturel  français de Kigali pendant vingt ans jusqu'au déclenchement du génocide et auteur d'un livre et de plusieurs autres documents sur le rôle de la France dans ce génocide, Vénuste Kayimahe a fait une déposition riche de détails accablants sur les agissements des officiels français en poste à Kigali à l'époque.

 

Il accuse la France de complicité de haut niveau dans le génocide. Remontant de 1989 jusqu'à 1994, il cite énormément d'exemples précis qui montrent la responsabilité de la France dans la préparation lointaine et la planification immédiate du génocide.

 

En 1989 déjà, lors d'une réception officielle en l'honneur des coopérants français à la résidence de France à Kigali, l'ambassadeur Georges Martres pouvait déclarer : « ce pays sera bientôt attaqué par des gens très méchants qui veulent détruire ses infrastructures et tout ce qui fait la fierté de votre coopération ».

 

Et se tournant vers des coopérants militaires français fraîchement arrivés qui étaient présents à la réception, il ajoutait : « ces militaires français viennent précisément pour empêcher cette catastrophe. »

 

Des réunions tournantes organisées soit chez l'ambassadeur ou chez d'autres officiels français de l'ambassade ou du centre culturel français réunissaient souvent extrémistes du régime Habyarimana et représentants de la France au Rwanda. « Front commun des Hutu contre le FPR », « défense civile » ; … toutes ces stratégies étaient conçues et débattues au cours de ces séances que le témoin considère comme ayant servi de cadre à « l'élaboration de la stratégie du génocide. »

 

Elysée Bisengimana :

 

Député à l 'Assemblée nationale, Elysée Bisengimana était étudiant à Nyakinama (Ruhengeri) de 1987 à 1992, mais il se trouvait chez lui à Kamembe (Cyangugu) au moment du génocide.   Son témoignage porte sur les deux périodes.

 

Etudiant à Nyakinama, il a vu des soldats français former des recrues rwandaises ainsi que des miliciens. Cela se passait sur le terrain de sport du campus même, parce que c'est là qu'étaient hébergés les Français.

 

Il a également vu des soldats français sur des véhicules portant des armes lourdes en direction de Cyanika, vers la ligne de front.

 

Bisengimana a  été aussi témoin de l'entrée des soldats français à Cyangugu. Il a constaté une collaboration très rapide entre miliciens Interahamwe et soldats français, collaboration qui a progressivement marginalisé les militaires et les gendarmes rwandais.

 

Soldats français et Interahamwe ont ensemble effectué des patrouilles, contrôlé les identités sur les barrières, appelé la population à fuir le pays devant l'avancée du FPR, détruit et pillé la ville de Cyangugu.

 

Bisengimana décrit globalement le rôle de la France comme un soutien aux auteurs du génocide et une tentative de contrer ceux qui voulaient arrêter le génocide. Complicité de génocide somme toute.

 

Nyandwi Désiré :

 

Député à l'Assemblée nationale, et chef d'un projet de l'Etat à Gikongoro durant le génocide, Nyandwi   a fait une courte déposition, et ses réponses aux questions des commissaires étaient tout aussi chiches et réservées.

 

Il accuse les soldats français d'avoir commis des pillages à Gikongoro. Habitant Rwamagana mais travaillant à Kigali tous les jours en 1992, il a également croisé plus de cinq fois des soldats français transportant des armes lourdes vers le front au Mutara.

 

Martin Ndamage :

 

Colonel dans l'armée rwandaise actuelle et ex-FAR, Martin Ndamage accuse l'Etat français d'avoir accordé un soutien inconditionnel au régime de Habyarimana   et son armée lors des combats contre le FPR. Il a été personnellement témoin de l'implication directe des soldats français dans la formation militaire et paramilitaire ou dans les combats à Nyakinama, Kinigi, Cyeru et Gabiro.

 

Il accuse également la France d'avoir soutenu le gouvernement qui a commis le génocide. Co-auteur de la fameuse déclaration de Kigeme qui condamnait le génocide et se désolidarisait du gouvernement Sindikubwabo-Kambanda , Ndamage et quelques uns de ses collègues ont été brimés et humiliés par les soldats français à Kavumu (près de Bukavu) parce qu'ils avaient manifesté l'intention de rentrer au Rwanda après la prise du pouvoir par le FPR.

 

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Rwanda News Agency

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