A propos des témoignages d'Immaculée Mpinganzima-Cattier

devant la Commission d'enquête citoyenne française
sur l'implication de la France dans le génocide des Tutsi du Rwanda

Étude de l'analyse d'Olivier Lanotte

Réception de ces témoignages par la CEC

En février 2004, Immaculée Cattier a communiqué à la CEC un document intitulé «PRÉSENCE DE MILITAIRES FRANÇAIS DANS LES AFFAIRES RWANDAISES» qu'elle avait rédigé et qui comportait cinq témoignages. Ces témoignages se situent dans la période de 1990 à 1992. Ce document imposa à la CEC d'entendre Madame Cattier dans le cadre des présomptions de complicité militaires. Deux des cinq témoignages écrits, directs et particulièrement graves, ont été retenus par la CEC.

La déposition de Madame Cattier se trouve pages 20 à 28 de notre rapport «L'horreur qui nous prend au visage» édité chez Karthala. Il est consultable en ligne sur cette page.

Le contenu principal du témoignage transcrit dans notre rapport


Après ce témoignage ci-dessous, le Président de la commission demanda à Madame Cattier de préciser la date du jour :
"En avril, je ne me souviens pas précisément de la date. C’était à la mi-avril 1991." fut sa réponse.

"Je m’appelle Immaculée Cattier, Mpinganzima est mon nom de naissance, et je viens de la région de Gisenyi, qui est la région de l’ancien président Habyarimana, à l’ouest du Rwanda, juste au bord du lac Kivu. En 1990, j’ai été emprisonnée comme tous les autres Tutsi. À ma sortie, je n’avais plus nulle part où aller. Je suis allée me cacher chez des frères canadiens, qui dirigeaient une école. Les rejoindre, déjà, a été très difficile. J’aurais pu mourir deux ou trois cents mètres avant d’atteindre l’endroit.

Les frères canadiens ont tenu à me protéger. Le directeur de l’école m’a proposé de me faire passer avec eux, en mettant mon nom sur un ordre de mission, à l’occasion d’un voyage qu’ils devaient faire à Kigali pour une réunion au ministère de l’Éducation. Avec un ordre de mission, j’évitais de devoir présenter aux barrages ma carte d’identité, qui portait la mention «Tutsi». Il devait pourtant demander l’avis des autres participants. C’était un bus scolaire, qui transportait des gens du sémi­naire, du lycée, des jeunes qui voulaient être prêtres, des frères. Tous ont été d’accord. Sauf deux Français, qui pensaient qu’il était risqué pour eux de me prendre avec eux, parce que je sortais de prison et que le bourgmestre me cherchait. Ils ont préféré voyager dans une voiture à part. Nous avons passé toutes les barrières sans problème, jusqu’à la sortie de Ruhengeri. Il y avait une grande barrière et beaucoup de gens. C’était la période où le FPR avait ouvert la prison et libéré les prisonniers poli­tiques. Le commandant de place était en prison, accusé d’avoir collaboré avec le FPR. Les militaires du barrage étaient donc des militaires de Kigali, des gens du Président, accompagnés de Français.

Il y avait là une queue de véhicules qui attendait un contrôle. La tension était à vous couper le souffle. De loin j’ai aperçu les autos blindées prêtes à attaquer. Avec comme chauffeurs des militaires blancs. Mes amis canadiens ont chuchoté : « les Français »… Nous avons vu les militaires qui contrôlaient, les miliciens qui tenaient les barrières en agitant les machettes dans tous les sens. Mon vieux protecteur m’a regardé dans le rétroviseur d’un ½il qui me rappelait que je devais garder le calme et le sang froid comme le jour où je suis arrivée chez eux sous une pluie de lances et de bambous bien aiguisés.

Les prières ne venaient plus en moi, je me croyais déjà morte. On avançait d’un ou deux mètres après le départ d’une voiture. Je me suis rendue compte que parmi les militaires il y avait des Français qui deman­daient aussi les cartes d’identités des Rwandais où figurait la mention « hutu », « tutsi », ou « twa ». Les Tutsi se faisaient sortir de la voiture et les militaires français les remettaient aux mains des miliciens agacés qui les coupaient à coups de machettes et les jetaient dans une rigole au bord de la grande route asphaltée Ruhengeri-Kigali. Après le couvre-feu un camion-benne de la commune venait charger les cadavres et les mettre je ne sais où (probablement dans une des fosses communes que la FIDH (Fédération Internationale des Droits de l’Homme) a découvertes en janvier-février 1993 dans la commune Kigombe-Ruhengeri).

Malgré les consignes des frères de faire semblant de ne rien craindre, j’ai tout de même jeté un coup d’½il dans le rétroviseur de notre minibus Hiace pour voir ce qui se passait dans d’autres voitures et j’ai vu un Tutsi qui se faisait sortir d’une voiture un peu plus loin que la nôtre. Après la vérification de sa carte d’identité, un militaire français et un autre officier rwandais l’ont donné aux miliciens qui ont commencé tout de suite, devant ces voitures, à le frapper de leurs machettes et de toutes autres armes qu’ils avaient, comme des ntampongano (gourdins), pour le jeter après dans la rigole (tout cela vite fait pour s’attaquer aux suivants).

Quand j’ai vu cela, j’ai regardé autour de nous dans la rigole où j’ai aperçu quelques corps qui gisaient sans bruit (ils meurent tous sans bruit). J’ai fermé mes yeux jusqu’à ce que notre moteur ait tourné long­temps sans s’arrêter et j’ai compris que nous avions eu l’autorisation de partir sans perte puisque j’étais la seule à être visée. Personne de notre voiture n’a commenté ce qui s’est passé, juste le frère directeur qui a de­mandé une petite prière dans nos c½urs pour ces gens qui se faisaient tuer. "

Suite du témoignage ...

  • Page 178 à 185 du livre d'Olivier Lanotte

    (Lien en attente de l'autorisation de l'éditeur de Monsieur Lanotte)
  • Courrier d'Emmanuel Cattier à Olivier Lanotte - juin 2007

  • En 2010 dans le livre de Jean-François Dupaquier,( L'agenda du génocide - Karthala, page 130), l'auteur fait commenter le témoignage d'Immaculée par l'espion radio rwandais Richard Mugenzi. Il confirme la réalité des comportements français "Peut être qu'en France vous vous étonniez que des militaires français aient tué des Tutsi, mais ils faisaient la même chose que les militaires et les miliciens [...]".

Réactions à ces témoignages

Ces témoignages ont été entendus par des journalistes présents le 22 mars 2004. Quelques uns ont interviewé  Immaculée Cattier le jour même. Un de ces interviews est passé sur une radio française. Ces témoignages sont publiés sur ce site internet depuis 2004.

Aucune réaction particulière des autorités françaises, y compris militaires, ne nous a été communiquée. 

En mars 2007, Olivier Lanotte, chercheur belge au CECRI, a publié "La France au Rwanda 1990-1994", préfacé par Claudine Vidal et édité chez P.I.E. Peter Lang. Ce livre représente le fruit de ses travaux de fin d'étude de "chercheur". Il est globalement de bonne qualité d'un point de vue européen. Olivier Lanotte a mis en doute la validité de ce témoignage qu'il juge "improbable" parce que unique, "tardif", "providentiel", "suspect", "sujet à caution" et "reconstruit" à partir "d'éléments  certes incontestables", pages 178 à 181 de son livre. Emmanuel Cattier, mari d'Immaculée Cattier et membre de la CEC, a écrit à Monsieur Lanotte pour apporter en réponse des éléments repris et complétés dans cette page.
  • Dans sa note 188, Olivier Lanotte affirme que le coopérant belge Pierre Jamagne n'a pas vu ce dispositif d'avril 1991. Nous avons rencontré Monsieur Jamagne  et nous avons appris qu'il était arrivé au Rwanda en décembre 91. Il n'a donc pas pu être témoin d'un barrage en avril 91. De plus il nous a précisé qu'il sortait rarement de Kigali. O.L. ne peut donc invoquer ce témoignage en toute rigueur.

  • Notes de l'Amiral Lanxade  à François Mitterrand

Le contexte du témoignage à la barrière de Ruhengeri en avril 1991

Cette région a vu depuis janvier 1991 la recrudescence inattendue des attaques du FPR que les stratèges rwandais et français croyaient en débandade depuis la mort de leur chef charismatique Fred Rwigema dès le début de l'offensive d'octobre 1990. Un événement particulièrement symbolique et traumatisant pour le pouvoir rwandais fût la prise de la prison de Ruhengeri par le FPR le 23 janvier 1991 et la libération des prisonniers qui a donné lieu ensuite à des campagnes de ratissage dans la région contre tout ce qui était "tutsi".

La présence des militaires français à Ruhengeri et leur compréhension de la situation

Les documents de l'époque corroborent la présence de soldats français à Ruhengeri en avril 1991. Deux notes de l'Amiral Lanxade à François Mitterrand  attestent de cette présence, liée aux événements de Ruhengeri depuis janvier 1991
« Une nouvelle offensive Ougando-tutsie a tenté le 2 février de conquérir la ville de Ruhengeri, au nordouest du Rwanda [...] Trois initiatives militaires ont été étudiées [...] le renforcement du dispositif Rwandais à Ruhengeri [...] en mettant en place à Ruhengeri un détachement d'assistance militaire et d'instruction (DAMI)[...] Leur mission serait de renforcer notre coopération et de « durcir » le dispositif rwandais.[...] » Note du 3 février 1991
« Le détachement d'assistance militaire et d'instruction (DAMI) mis en place dans la région de RUHENGERI poursuit le recyclage des unités rwandaises et la formation des cadres de la zone. La sécurité de cette localité s'améliore constamment et il paraît difficile d'envisager un nouveau raid rebelle [...] » Note du 22  avril 1991
On notera les guillemets autour du mot "durcir" dans la note du 3 février 1991. (Voir  photocopies complètes des notes ci-contre). Un autre élément attire l'attention et revient dans la plupart des notes de l'Amiral Lanxade dont nous disposons : l'amalgame entre Tutsi et FPR. Cet amalgame ne semble pas propre à l'Amiral Lanxade, mais être commun à tout l'État-major militaire français qui s'occupe du Rwanda. Dès lors les contrôles d'identité sur la base de la carte d'identité ethnique par des Français peuvent être considérés comme probables.

  • Il est intéressant de remarquer que le député Jean-Claude Lefort, vice-président de la mission parlementaire française sur le Rwanda, s'est étonné qu'il n'avait pas d'informations sur la période du 18 janvier au 21 août 1991.

    "Suite à l'examen du dossier DAMI (télégrammes diplomatiques et pièces de même origine), j'ai noté qu'il n'y avait aucun élément se rapportant à la période allant du 18 janvier au 21 août 1991."notes 1 et 10  dans La Nuit Rwandaise N°2 d'avril 2008

La présence de civils armés aux barrières en avril 1991

Les historiens datent la création des milices, qui s'illustreront dans le génocide, du deuxième semestre de 1991 à 1992, au moment du lancement du multipartisme, constituées par les jeunes de ces partis. Toutes ces milices seront confondues dans le terme de celle de l'ancien parti unique, le MRND : les Interahamwe. Pourtant des documents du premier semestre de 1991 font état de civils armés qui écument les campagnes contre les Tutsi en relation avec les Forces armées rwandaises et sont présents à des barrières.

Un article de Patrick Girard, « Sur les routes du paradis perdu », paru dans Jeune Afrique, N° 1583 du 1 mai au 7 mai 1991, décrit la situation. Il parle de couvre-feu et de barrières :
« [...] il faut obtenir une feuille de route, une autorisation de déplacement, [...] et accepter de patienter aux multiples barrages routiers, militaires et civils, éparpillés le long des routes. [...] Si les barrages militaires manifestaient une confraternité de bon aloi, les civils faisaient preuve d'une rigueur dix fois plus grande. Armés de lances et de machettes, quelques paysans arrêtèrent notre véhicule [...] »
Patrick Girard a aussi entendu qu'on ne s'en serait pas pris à la « minorité tutsi » [...] « Propos à vérifier, notai-je mentalement » (c'est lui qui l'écrit). Pourtant dans la suite de l'article on ne voit aucun souci de "vérifier" ces "propos", mais une narration du contexte de guerre justifiant implicitement la vision stratégique française de cette guerre.

Dans le journal L'instant, qui serait daté du 20 juin 1991, sous le titre « Massacres cachés au Rwanda », Jean-Pierre De Staercke relate des actes de groupes de civils armés associés aux FAR. Il revient sur les événements qui suivirent la libération de la prison de Ruhengeri :
«[...] Les FAR accompagnées de civils hutu se seraient livrées à leurs carnage sans faire de sélection [...] Des militaires [...] sont venus prêter main forte à des groupes de civils hutu qui avaient ouvert la chasse aux Bagogwe et plus généralement à la population tutsi de la région [...] [Les] victimes [...] auraient été achevées par des femmes et des enfants de militaires [...]».

Un document d'ONG rwandaise de 1992

Un "rapport sur les droits de l'homme au Rwanda" édité par "l'association rwandaise pour la défense des droits de la personne et des libertés publiques ADL- Kigali" a été publié en décembre 1992. Il concerne la période de septembre 1991 à septembre 1992. Il est illustré par un dessin, légendé "La tolérance", qui représente trois hommes : un homme qui attaque un autre homme à terre et blessé avec une machette, le troisième homme tente de s'interposer dans une posture emprunte de calme et d'autorité. On trouve, entre autres, dans ce document des témoignages de religieux et d'un officier supérieur des FAR qui confirment le climat de l'époque dans le nord-ouest du Rwanda, où l'armée française était présente et entrainait la gendarmerie et l'armée.
Ainsi, page 106, parlant de février 1991, Monseigneur Kalibushi, évêque de Nyundo à cette époque, "[...] a vu cinquante jeune gens, armés de pieux de bambou, en train de piller les maisons des professeurs qui s'étaient réfugiés au petit séminaire de Nyundo [...] les Tutsi, [...] étaient chassés et tués [...] Les tueurs n'ont pas été découragés, même au moment où l'évêque a alerté les autorités.  [...]."
Page 319 du même rapport commence le témoignage du 29/10/1992 du Lieutenant-colonel des Forces armées rwandaises Charles Uwihoreye, qui confirme dans quel contexte il a tenté de contrer des dérapages criminels du régime, assuré la défense de la ville de Ruhengeri en janvier 1991 et constaté au c½ur de ces événements, de l'intérieur, la désorganisation locale de l'armée d'Habyarimana qui corrobore la note de l'Amiral Lanxade du 3 février 1991 et sa réorganisation au même endroit dans la note du 21 avril 1991.

  • Voir sur cette page liée un extrait de Billet d'Afrique N° 66 bis qui relate la façon dont la commission parlementaire française a traité Yvonne Mutimura-Galinier, dont les témoignages sont pourtant moins compromettants pour l'armée française.

Réflexions provisoires

On peut remarquer dans le livre de Monsieur Lanotte  la même méfiance à l'égard du témoignage d'Yvonne Mutimura-Galinier dont pourtant il est obligé de reconnaitre une grande partie du contenu par d'autres recoupements. Son attitude à l'égard de Vénuste Kayimahe est semblable à priori. Par contre le témoignage du "fameux" Ruzibiza, transfuge du FPR, mais qui est soutenu par le juge Bruguière, Stephen Smith, Pierre Péan, André Guichaoua et Claudine Vidal ne lui apparaissent pas "sujets à caution", malgré les nombreuses objections qu'il suscite pourtant quant à son authenticité. N'y a-t-il pas derrière cette méfiance sélective un "pli culturel" ?

Une question se pose. Quelle attitude avoir par rapport à des témoins directs dont on exige, quand ils sont Rwandais, de prouver à 100% la validité de leur témoignage ? D'abord le respect. Les morts ne peuvent pas parler. Cela n'autorise pas tout, mais laisser penser qu'ils mentiraient parce que nous ne reconstruisons pas la cohérence de l'histoire selon notre idée serait pour le moins présomptueux - surtout en l'absence d'éléments à leur opposer autres que des insinuations sans véritable fondement, comme le montrent certains arguments de ma lettre à Olivier Lanotte, relatifs à l'itinéraire vérifiable d'Immaculée Cattier, que je n'ai pas rappelés ici. Force est de remarquer que les témoins rwandais sont très peu pris au sérieux en France et en Belgique et qu'on préfère souvent entendre les propos de nos concitoyens qui confortent notre vision des choses, fussent-ils des militaires qui tentent de se justifier.

On peut noter que plusieurs auteurs ont tenté de dénigrer Survie, et donc "ses témoins" et la CEC dont elle est partie prenante, notamment à travers les propos de Jean Carbonare, président de Survie jusqu'en 1994. On lui reproche d'avoir affirmé dans l'humanité Dimanche du 5 août 1994 et dans le Nouvel Observateur du 4 août 1994 qu'il aurait "vu" les militaires français dans des camps militaires rwandais du Nord-ouest, où s'étaient précisément passé des massacres de Tutsi-Bagogwe, alors qu'il avait seulement des informations qu'il jugeait très sûres par leur source. Ces informations ont été confirmées par la suite. On l'a traité douze ans après d'affabulateur. Mais il suffit de regarder la vidéo de son interview de janvier 1993 pour comprendre quelle mesquinerie inspire ceux qui mènent ce combat pour tenter de relativiser l'implication de la France, alors que Jean Carbonare est l'un des rares français à avoir tenté de ramener dignement à la raison la politique de la France, quand il était encore temps.

Jean Carbonare n'a jamais prétendu être historien. Quand il parle ainsi il est dans une logique de justice, d'engagement réparateur au Rwanda. Il justifie son engagement. Toute sa vie, il a voulu "mobiliser" des actions efficaces contre la misère et l'injustice. "Vous pouvez faire quelque chose...". Son langage apparait ici plus soucieux d'efficacité mobilisatrice que de fidélité à ses sources.

C'est à l'époque où il passe le flambeau à François-Xavier Verschave que Jean Carbonare tient ces propos qui ne sont pas contestables sur le fond, mais sur la forme car ils ne reflètent pas la manière dont il a eu l'information. C'est François-Xavier Verschave qui entrainera ensuite Survie dans des registres jusqu'ici réservés aux chercheurs, obligeants à une plus grande exigence documentaire et discursive qui s'avèrera parfois plus rigoureuse et investigatrice que celle des professionnels.

En fait cette critique, apparue en 2005, semble "providentielle" pour dénigrer implicitement la CEC, Survie et le témoignage d'Immaculée Cattier, exprimé publiquement en 2004, qui a "vu",  elle aussi, des militaires français donner en fin de compte des Tutsi à des civils armés qui les tuaient devant eux. Le parallèle est tentant, d'autant plus qu'Immaculée est l'épouse d'un militant de Survie.

Olivier Lanotte reprend cette critique contre Jean Carbonare page 182-183, une page après son traitement du témoignage d'Immaculée Cattier. S'il parle aussi ensuite de l'interview de Jean Carbonare de janvier 1993, c'est uniquement pour augmenter sa critique qui s'affirme unilatérale. On voit là l'influence de la propagande française intensifiée depuis 2005 contre le "cabinet noir du FPR en France" et acceptée sans critique méthodologique par des chercheurs français et belges, qui se montrent ainsi consentants. Mais finalement Olivier Lanotte reconnait, au sujet des interrogatoires par des officiers français au Rwanda, p 185 de son livre, que les "démentis des autorités françaises, notamment militaires, ne sont guère convaincants" à cause des pratiques connues de l'armée française dans d'autres conflits. Pourquoi ne fait-il pas la même analogie là où Survie et la CEC apportent des contributions ?



Il est bien clair que le témoignage d'Immaculée Cattier est unique et "particulièrement grave" pour la France comme pour le régime Habyarimana. D'autres témoignages seraient sans doute nécessaires pour emporter l'adhésion des historiens quant au comportement de l'armée française en 1991 au Rwanda. Mais il est également clair que le contexte franco-rwandais, et l'histoire des deux armées et de leurs dirigeants politiques, ne sont pas contradictoires avec le contenu de ce témoignage et le rendent même plausible.

Pour la CEC, Emmanuel Cattier.
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